Source France – L’Action Agricole Picarde
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Une plante pérenne très mellifère, qui s’en sort même en cas de stress hydrique une fois bien implantée, valorisée dans les rations pour l’élevage mais aussi à fort pouvoir méthanogène. La silphie, très répandue en Allemagne, fait pointer de plus en plus de fleurs jaunes en France. Une réunion d’information était organisée à la Chambre d’agriculture d’Abbeville, ce 27 février.
Voilà un peu plus de trois ans qu’elle a fait son apparition dans les terres agricoles françaises, et chaque année, elle gagne un peu plus de surface. La silphie, astéracée originaire de régions tempérées d’Amérique du Nord, séduit de plus en plus de producteurs, à destination de l’alimentation animale et de la méthanisation. 120 ha étaient implantés en 2019 dans les Vosges. 7 000 ha le sont désormais dans tout le pays. «Il s’agit chez nous de la variété Abica Perfo, non invasive, distribuée par notre société HADN sous la marque Silphie France. Nous garantissons un taux de germination supérieur à 90 %, et surtout, nous apportons le conseil technique indispensable à la réussite de l’implantation», présente Noémie Breton, de Silphie France, ce 27 février, devant une salle comble dans les locaux de la chambre d’agriculture, à Abbeville.
Il faut dire que la plante est séduisante. Une fois bien implantée, cette plante pérenne (au moins quinze ans) peut atteindre 3,5 m de hauteur et peut fournir jusqu’à
80 tiges par pied, donc présente une forte biomasse. Comptez entre 10 et 20 t de matière sèche par hectare selon la conduite. La silphie est très mellifère, avec une floraison de mi-juillet à septembre, lorsque la plaine est pauvre en fleurs. «Les abeilles peuvent produire 150 kg de miel par hectare», assure Amédée Perrein, co-fondateur de Silphie France. Il s’agit d’une plante zéro phyto : «elle nécessite un désherbage mécanique – puisqu’aucun produit n’est homologué la première et deuxième année, mais ensuite, la silphie étouffe les adventices.»
Régénération des sols
Un refuge pour le gibier, diriez-vous ? «Pas du tout. Les sangliers n’apprécient pas sa texture rugueuse», assure Noémie Breton. Elle est appréciée pour valoriser des ZNT, des zones de captage et inondable, des parcelles éloignées et peut être conduite en agriculture bio. Une fois implantée, elle s’avère très résistante. «Elle résiste jusqu’à
– 40°C. Son système racinaire, très fin, est aussi très profond, jusqu’à 2,50 m sous le sol. Lors des printemps secs, elle peut déjà faire 2 m de haut, alors que le maïs ne dépasse pas le genou.» Ces racines résistent aussi à une immersion totale prolongée. Elles sont de l’or pour les sols : elles pourrissent naturellement, forment ainsi 6 à 8 t d’humus par hectare, et sont capables de régénérer des sols pauvres en matière organique en une petit dizaine d’année. Quand à l’eau, ses feuilles attachées à leur base, comme celles de la rubarbe, receuillent la moindre rosée. «On l’appelle la plante bain d’oiseau.»
La valorisation peut être de deux sortes. «En France, 50 % des producteurs l’utilisent en fourrage, 50 % pour la méthanisation», note Noémie Breton. En fourrage, elle pourra être récoltée trois ou quatre fois par ans, «conduite comme de la luzerne», en ensilage ou en enrubannage. Les valeurs alimentaires présentées sont les suivantes : 19 à 20 points de protéines, et des UF d’environ 0,90. Elle se récolte entre 28 et 32 % de MS. Pour la méthanisation, elle se récolte une fois par an, fin août ou début septembre. «La teneur en méthane du biogaz varie de 51 à 55 %. En laboratoire, un rendement de 310 l de méthane par kg de matière sèche a été atteint. Une production moyenne de 15 à 20 t de matière sèche par hectare produit 4 650 m3 de biogaz environ.» La Silphie est néanmoins – «pour l’instant» – considérée comme une culture principale, et entre donc dans le quota des 15 % du volume qui entre dans le méthanisateur.
Quelques contraintes
N’imaginez cependant pas la «plante miracle». Celle-ci comporte tout de même quelques défauts. Premièrement, son coût : entre 1 500 et 1 800 € de semences par hectare. «Cela s’explique par les techniques de récolte des semences très gourmandes en main-d’œuvre. Les graines de silphie se récoltent à la main uniquement, puis celles-ci subissent un traitement pré-germinatif en usine, qui nécessite une alternance de températures plus ou moins élevées pendant plusieurs semaines», justifie Noémie Breton. Presque tous les sols sont adaptés, mais ceux à faible pH (moins de 6,5) sont à proscrire. Les deux premières années, le temps de l’implantation, n’espérez pas de vraie valorisation. «La semence est amortie au bout de cinq ans.» Pour pallier la perte financière de la première année, qui ne permet pas de récolte, Silphie France propose de semer la silphie sous couvert de maïs. «Mais cette implantation est moins performante que seule.» Surtout, l’implantation est la plus délicate, et présente un risque financier important en cas d’échec.
Réussir son implantation
L’implantation de la silphie est l’étape à ne pas louper. Silphie France apporte ses connaissances pour cela. Tout d’abord, la préparation optimale du sol consiste en un revêtement lâche et finement friable d’environ 1 cm, la graine pressée dans la terre favorisant le contact avec l’eau du sol. «Pour le semis, il est donc important que l’ameublissement du sol soit aussi plat que possible.» Le sol ne doit être utilisé à cette fin que s’il est bien sec. Il doit bien s’émietter et ne doit pas s’agglomérer. Il convient de semer avec un semoir monograine avec disques spécifiques (type betteraves). La silphie Abica Perfo est généralement déposée à une profondeur de semis de 1 cm. S’il y a une menace de sécheresse, il est possible et préférable de la déposer à une profondeur maximale de 2 cm.
Afin d’obtenir un peuplement suffisamment dense et uniforme d’au moins 4 plantes/m2, il faut des débits de semis allant de 2,3 kg jusqu’à 3 kg/ha, ce qui donne une densité de semis de 11 à 15 grains/m2.
La fertilisation est conseillée au début de chaque année de végétation, en fonction du rendement escompté : 100 à 160 kg N/ha pour 12 à 20 TMS/ha. «Au cours de l’année d’implantation, une dose de départ d’environ 130 kg N/ha est suffisante. En association avec le maïs, il convient de procéder à une conduite habituelle du maïs.» La fertilisation doit avoir lieu relativement tôt afin d’éviter d’endommager le sol et ne pas dépasser 50 m3/ha. Un épandage au printemps et un fractionnement en deux passages à un mois d’intervalle est préférable.